Le 15 décembre 2024, à Abuja, les douze membres restants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont accordé un délai de réflexion de six mois au Mali, au Niger et au Burkina Faso, pour envisager un éventuel retour au sein de l’organisation. Cependant, ces trois pays, désormais membres de l’Alliance des États du Sahel (AES), semblent résolus à tourner définitivement la page.
Une émancipation des contraintes politiques de la CEDEAO
Pour les dirigeants du Mali, du Niger et du Burkina Faso, quitter la CEDEAO représente une opportunité de se libérer des restrictions imposées par le protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance. Ces obligations incluent notamment l’organisation d’élections à échéances fixes et l’interdiction pour les chefs de transition issus de coups d’État de briguer un mandat.
Selon Gilles Yabi, fondateur du think tank Wathi, ce départ leur offre une plus grande marge de manœuvre pour gérer leurs transitions politiques sans subir de pressions extérieures. En se soustrayant à ces règles, ces pays peuvent adopter une gouvernance plus adaptée à leurs contextes nationaux.
Une quête de souveraineté et de sécurité régionale
La CEDEAO est souvent critiquée pour son alignement perçu avec les intérêts de puissances étrangères. En rompant avec cette organisation, le Mali, le Niger et le Burkina Faso cherchent à affirmer leur autonomie et à consolider leur souveraineté nationale. L’AES devient ainsi une plateforme qui recentre la coopération régionale sur des priorités spécifiques, comme la lutte contre le terrorisme et le renforcement des liens économiques et militaires.
Les sanctions économiques et diplomatiques imposées par la CEDEAO, considérées comme injustes par ces pays, ont également joué un rôle clé dans leur décision. Quitter cette organisation leur permet de s’affranchir de mesures coercitives jugées inefficaces et contre-productives.
L’AES : un modèle de coopération alternatif
Avec l’AES, ces nations aspirent à promouvoir une intégration régionale basée sur des valeurs communes et une approche pragmatique des défis sahéliens. Ce modèle, moins politisé, pourrait inspirer d’autres pays africains désireux de s’éloigner des cadres rigides de la CEDEAO.
Alors que les tensions persistent entre les deux organisations, le départ du Mali, du Niger et du Burkina Faso illustre un tournant majeur dans la dynamique politique et économique de l’Afrique de l’Ouest. L’AES pourrait ainsi incarner un renouveau dans la coopération régionale, axée sur les besoins spécifiques des peuples du Sahel.